jueves, junio 18, 2020

Francis Ponge / Costumbres nupciales de los perros













       ¡Hay que ver las costumbres nupciales de los perros! En un pueblo de Bresse, en 1946… (lo preciso porque, dada esa famosa evolución de las especies, si se precipitara… o si hubiera una mutación brusca: nunca se sabe)…

¡Qué curioso ballet! ¡Qué tensión!
¡Es magnífico ese movimiento que engendra la pasión específica! ¡Dramático! ¡Y qué bellas curvas tiene eso! Con momentos críticos, paroxísticos y gran paciencia, perseverancia inmóvil maniática, ambages con muy amplias revoluciones, circunvoluciones, cacerías, paseos a paso especial…
¡Oh! ¡Y esa música! ¡Qué variedad!
Todos esos individuos como espermatozoides, que se juntan después de inverosímiles, de ridículos rodeos.
¡Pero esa música!
Esa hembra acosada; cruelmente importunada; y esos machos rastreadores, gruñones, músicos.
Dura unos ochos días… (más quizás: voy a corregir cuando haya terminado).

Qué maniáticos esos perros. Qué terquedad. Qué brutos sombríos. ¡Qué grandísimos tontos! Tristes. Limitados. ¡Qué hincha pelotas!
Ridículos de terquedad. Quejumbrosos. Como escuchando, husmeando. Atareados. Humeatareados. Alzando y frunciendo triste, cómicamente las cejas. Completamente tensos: orejas, lomos, corvas. Gruñendo. Quejumbrosos. Ciegos y sordos a cualquier otra cosa que no sea su determinación específica.
(Comparen esto a la gracia y a la violencia de los gatos. También a la gracia de los caballos).

Pero no era mi perra, era la del vecino, el Cartero Féaux: no pude ver eso lo suficientemente cerca, observar los órganos de la dama, su olor, sus regueros, sus pérdidas de semen.
No pude darme cuenta de si había empezado por ser provocativa, o si solamente eso le había pasado (su estado primero, sus pérdidas, su olor, luego los machos y sus tan largas, tan molestas asiduidades), si eso sólo había sido para ella un asombro doloroso y una queja, tímida, con desplazamientos medidos, consentidos.
En fin, ¡qué drama! ¡Qué abrumadora, irritante, absurda debe haberle parecido la vida entonces revelada!
¡Y ahí está herida para siempre –también moralmente!
Pero tendrá sus bellos cachorritos… Para ella sola, durante algún tiempo… Entonces los machos ya no van a joderla, y qué felicidad con sus pequeños, que diversión incluso, qué plenitud –a pesar, tal vez, de mucho estorbo entre las patas y bajo el vientre a veces, mucho cansancio.

En fin, no dormimos mucho durante esos ocho días… Pero no importa: no se puede gozar de todo a la vez –del sueño y de algo así como una serie de representaciones nocturnas en el Teatro Antiguo.
La luna además (encima de las pasiones) me pareció cumplir también un gran papel.

1946

de Pièces  (1961)

Francis Ponge (Montepellier, Francia, 1899-Le Bar-sour-Loup, Francia, 1988), Poesía francesa contemporánea 1940-1997, selección, traducción, prólogo y notas de Jorge Fondebrider, Libros de Tierra Firme, Buenos Aires, 1997


MŒURS NUPTIALES DES CHIENS 

Les mœurs nuptiales des chiens, c'est quelque chose! Dans un village de Bresse, en 1946… (je précise, car étant donné cette fameuse évolution des espèces, si elle se précipitait… ou s'il y avait mutation brusque : on ne sait jamais)…

Quel curieux ballet! Quelle tension!
C'est magnifique, ce mouvement qu'engendre la passion spécifique. Dramatique! Et comme ça a de belles courbes! Avec moments critiques, paroxystiques et longue patience, persévérance immobile maniaque, ambages à très amples révolutions, circonvolutions, chasses, promenades, à allure spéciale…
Oh! Et cette musique! Quelle variété!
Tous ces individus comme des spermatozoïdes, qui se rassemblent après d'invraisemblables, de ridicules détours.
Mais cette musique!
Cette femelle traquée; cruellement importunée; et ces mâles quêteurs, grondeurs, musiciens.
Cela dure des huit jours… (plus peut-être : je corrigerai quand ce sera fini).

Quels maniaques, ces chiens. Quel entêtement. Quelles sombres brutes. Quel grands bêtas! Tristes. Bornés. Quels emmerdeurs!
Ridicules d'entêtement. Plaintifs. L'air à l'écoute, au flair. Affairés. Affairés. Haussant et fronçant tristement, comiquement les sourcils. Tout tendus : oreilles, reins jarrets. Grondants. Plaintifs. Aveugles et sourds à toute autre chose qu'à leur détermination spécifique.
(Comparez cela à la grâce et à la violence des chats. A la grâce aussi des chevaux.)

Mais ce n'était pas ma chienne, c'était celle du voisin, le Facteur Féaux : je n'ai pas pu voir cela d'assez près, observer les organes de la dame, son odeur, ses traînées, ses pertes de semence.
Je n'ai pu me rendre compte si elle avait commencé par être provocante, ou si seulement cela lui était venu (son état d'abord, ses pertes, son odeur, puis les mâles et leurs si longues, si importunes assiduités), si ça n'avait été pour elle qu'un étonnement douloureux et qu'une plainte, timide, avec déplacements mesurés, consentants.
Enfin, quel drame! Comme la vie, alors révélée, a dû lui paraître harassante, énervante, absurde!
Et la voilà blessée pour toujours, – moralement aussi! Mais elle aura ses beaux petit chiots… Pour elle seule, pendant quelque temps… Alors les mâles lui ficheront la paix, et quel bonheur avec ses petits, quel amusement même, quelle plénitude, – malgré parfois beaucoup d'encombrement entre les pattes et sous le ventre, beaucoup de fatigue.
En fin, nous n'avons pas beaucoup dormi, pendant ces huit jours… Mais ça ne fait rien : on ne peut pas jouir de tout à la fois, – du sommeil et de quelque chose comme une série de représentations nocturnes au Théâtre Antique.
La lune par là-dessus ( au-dessus des passions) m'a paru tenir aussi un grand rôle.

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