sábado, enero 10, 2009

Charles Baudelaire / De "El spleen de París"





El perro y el frasco


"-Mi lindo perro, mi buen perro, mi querido perrito, acércate y ven a respirar un excelente perfume comprado en la mejor perfumería de la ciudad."
Y el perro, agitando la cola, lo que es, creo, entre esos probres seres, el signo correspondiente a la risa y la sonrisa, se aproxima y posa curiosamente su nariz húmeda sobre el frasco destapado; después, reculando de improviso con espanto, ladra contra mí a manera de reproche.
"-¡Ah! miserable perro, si te hubiera ofrecido un paquete de excrementos, lo hubieras olfateado con delicia y quizá devorado. Así, tú mismo, compañero de mi triste vida, te pareces al público, a quien nunca hay que ofrecer delicados perfumes que lo exasperan, sino inmundicias cuidadosamente elegidas."

El espejo

Un hombre horroroso entra y se mira en el espejo.
"-¿Por qué se mira usted en el espejo, si no puede verse en él más que a disgusto?"
El hombre horroroso me responde: "-Señor, de acuerdo con los inmortales principios del 89, todos los hombres son iguales en sus derechos: por lo tanto tengo el derecho de mirarme; con placer o disgusto, es cosa que solo atañe a mi conciencia."
En nombre del buen sentido, sin duda tenía yo razón; pero, desde el punto de vista de la ley, él no estaba equivocado."

Charles Baudelaire (París, 1821-1867), Le spleen de París (Petits poèmes en prose)
Versiones de Rodolfo Alonso, revista Fijando Vértigos, N°18, Buenos Aires, 2008

La chien et le flacon
"- Mon beau chien, mon bon chien, mon cher toutou, approchez et venez respirer un excellent parfum acheté chez le meilleur parfumeur de la ville." Et le chien, en frétillant de la queue, ce qui est, je crois, chez ces pauvres êtres, le signe correspondant du rire et du sourire, s'approche et pose curieusement son nez humide sur le flacon débouché; puis, reculant soudainement avec effroi, il aboie contre moi, en manière de reproche.
"- Ah! misérable chien, si je vous avais offert un paquet d'excréments, vous l'auriez flairé avec délices et peut-être dévoré. Ainsi, vous-même, indigne compagnon de ma triste vie, vous ressemblez au public, à qui il ne faut jamais présenter des parfums délicats qui l'exaspèrent, mais des ordures soigneusement choisies."

Le miroir
Un homme épouvantable entre et se regarde dans la glace.
"-Pourquoi vous regardez-vous au miroir, puisque vous ne pouvez vous y voir qu'avec déplaisir?"
L'homme épouvantable me répond: "-Monsieur, d'après les immortels principes de 89, tous les hommes sont égaux en droits; donc je possède le droit de me mirer; avec plaisir ou déplaisir, cela ne regarde que ma conscience."
Au nom du bon sens, j'avais sans doute raison; mais, au point de vue de la loi, il n'avait pas tort.

Foto: Baudelaire, por Nadar, circa 1855

No hay comentarios.:

Publicar un comentario